Alin Stoica analyse Anderlecht: "Tu as acheté une Ferrari, Marc Coucke. Pas une Fiat !"
Alin Stoica n’épargne pas son ex-club avant le début des playoffs.
- Publié le 30-03-2019 à 07h50
- Mis à jour le 30-03-2019 à 12h12
Alin Stoica n’épargne pas son ex-club avant le début des playoffs. Voilà 20 ans, déjà, qu’Anderlecht a joué le meilleur match de son histoire à Genk. Alors que les Limbourgeois s’apprêtaient à fêter le titre, le Sporting de Jean Dockx a écrasé le Genk d’Aimé Anthuenis : 2-5. Les hommes du match étaient Thomasz Radzinski (deux buts) et Alin Stoica (un but et un assist).
Tiens, cela faisait longtemps qu’on n’avait plus entendu parler de Stoica. "Je suis de passage en Belgique", nous répond-il au téléphone. "Rendez-vous au restaurant Pantalone chez mon ami Raffaele."
Les cheveux plus longs, la barbe assez forte, Stoica (39 ans) a changé de look, mais pas d’idées. "Quand on fait la différence avec le ballon, il ne faut quand même pas courir..."
Alin, reparlons tout d’abord de ce fameux match de 1999. Vous souvenez-vous de quelque chose ?
"Je me souviens de tout. Mon contrôle de la poitrine suivi par une volée dans le plafond, sur un centre de Van Diemen. Et mon assist vers Tomasz. On avait une équipe de tonnerre. On était tellement libérés, qu’on aurait battu tout le monde à ce moment-là. Même le Real Madrid. On avait explosé le Standard 0-6, deux semaines auparavant. Si le championnat avait duré deux semaines de plus, on était champions. Pourtant, on venait de loin."
D’où venait cette suprématie ?
"On se surpassait grâce à Jean Dockx. Il parvenait à rentrer dans la tête des joueurs. C’était une bonne personne. On parlait, on rigolait. Et le dimanche, on gagnait. Je sais que c’est difficile de comparer des générations. Mais quand je vois l’Anderlecht actuel… À mon époque, on commençait le match avec un avantage de 2-0. Les adversaires se demandaient combien ils allaient perdre. Et maintenant, Michael Verschueren déclare qu’il va faire la fête parce qu’Anderlecht s’est qualifié pour le top 6..."
Vous avez souvent vu jouer Anderlecht ?
"J’ai vu le 4-2 au stade, et pour le reste, je vois Anderlecht à la télé. Disons que la façon dont le Sporting s’est qualifié pour les playoffs 1 n’est pas importante. Vous verrez, ce sera l’équipe la plus dangereuse des six."
Ah bon, pourquoi ?
"À cause de votre système de playoffs. Celui qui a un gros retard a des ailes au début des playoffs. Imaginez-vous le stress qui règne à Genk. Ils risquent de perdre 25 millions, alors qu’ils étaient les meilleurs de la saison. Et tout cela pour des raisons commerciales. Pour que les supporters vident leur portefeuille. On se moque de qui ? C’est un manque de respect. Pour moi, Genk est champion."
Vous expliquez comment cette baisse de niveau à Anderlecht ?
"Les joueurs ne sont pas responsables. Ils ne sont pas venu frapper à la porte du vestiaire pour demander s’ils pouvaient jouer. C’est la direction qui est fautive. Cela aussi, c’est un manque de respect envers les supporters. Les fans, eux, ne sont plus comme avant. Ils acceptent, alors qu’ils doivent réagir. Je me souviens d’une défaite contre le RWDM. Nos supporters étaient sur le terrain. Je ne connais pas bien Marc Coucke. Mais il sait quand même ce qu’Anderlecht représente ?"
À savoir ?
"Anderlecht est une Ferrari ou une Rolls Royce. Grâce à ses supporters et à ses ex-joueurs. Il faut soigner le club comme une Ferrari, et pas comme une Fiat ou une Dacia. Heureusement qu’il a eu Verschaeren. Il a qualifié Anderlecht a lui seul pour les playoffs."
Jacky Munaron l’a comparé au jeune Stoica. Mais il y a ajouté que Yari travaille plus.
"Tout d’abord, Verschaeren va devenir un grand. Ou plutôt, il est déjà un grand. Moi, j’avais aussi 17 ans quand Vandereycken m’a mis dans l’équipe première. Et c’est vrai, je courais moins que Verschaeren. Mais moi, je titulariserais toujours un joueur qui court un kilomètre par match mais inscrit deux buts. Messi, il court beaucoup ? Sept kilomètres. Et il se promène souvent. Ce qui est important, c’est ce qu’on fait balle au pied."
Donc, vous êtes fan de Carcela.
"Il est le seul qui mérite de gagner le Soulier d’or."
Je ne crois pas que le club va vous demander pour venir donner le coup d’envoi.
"De toute façon, je n’aurais pas été invité. Et ceux qui sont venus - comme Scifo et Crasson - ils n’ont plus rien entendu par après. Donnez-leur une fonction, afin que l’ADN du club ne disparaisse pas !"
Zetterberg est là pour cela.
"Oui, mais il est renvoyé en tribune. Il ne peut même plus se mettre sur le banc. C’est n’importe quoi. Et ce changement de nom du stade, cela ressemble à quoi ? Je vous le dis et le répète : on se moque des supporters…"
"J'ai renoncé à la nationalité roumaine"
Stoica explique pourquoi il est devenu un Belge pur sang et pourquoi il a arrêté le foot à 29 ans.
"Vous pouvez me faire un plaisir ?", demande Stoica au début de l’interview. "Quand vous parlez encore de Stoica dans vos articles, n’écrivez plus ‘le Roumain’, mais mettez ‘le Belge.’"
Stoica explique son changement de nationalité. "Je suis allé au consulat et j’ai renoncé à la nationalité roumaine. Je regrette de ne pas l’avoir fait plus tôt. Cela m’aurait permis de jouer pour l’équipe nationale belge. J’ai la nationalité belge depuis l’an 2000, mais j’avais joué pour la Roumanie (NdlR : 13 matchs)."
C’est la mentalité roumaine qui dérange Stoica. "Toujours cette jalousie. Je suis un garçon sensible. Pour moi, c’est important d’être aimé. Comme par Jean Dockx. En Roumanie, cela n’a jamais été le cas. J’étais le fils de Tudorel, qui avait gagné la Ligue des champions avec le Steaua Bucarest. En tant que fils d’un grand joueur comme lui, c’était impossible de réussir."
Après son départ d’Anderlecht à Bruges en 2002, on n’a plus jamais revu le meilleur Stoica. Après avoir joué dans onze clubs, il a arrêté en 2009, à 29 ans. Le club serbe de Vojvodina était son dernier employeur. "J’étais vide. J’avais perdu la passion. Moi, je ne jouais pas pour gagner de l’argent. Je jouais pour mon plaisir. Et quand la passion n’y est plus…"
Cela fait quelques années qu’il habite en Suisse (voir ci-dessous). "Mais je suis assez souvent en Belgique. Et de temps en temps, comme pendant les fêtes de fin d’année, je vais en Roumanie. Attention, c’est un pays magnifique. Mais cette mentalité…"
Voilà dix ans que Stoica n’a plus tâté professionnellement du ballon rond. "Je fais encore du sport", sourit-il. "Je vais courir, je fais du mini-foot, de la musculation. Et quand je vois le football actuel, je me dis que je pourrais encore signifier quelque chose sur un terrain…"
"Conseillé d'un agent en Suisse"
Même s’il est dégoûté par le côté commercial du football, Stoica est resté dans le monde du foot. "Cela fait trois ans que je vis en Suisse, où je suis conseillé d’un agent de joueurs", dit Stoica. "Je ne suis donc pas manager. Mais quand il y a un joueur intéressant, cet agent demande mon avis."
En plus de cela, il suit des cours d’entraîneur. "Je ne sais pas si je vais devenir T1, mais avec mon expérience, je serais peut-être un bon T2. Je n’ai pas joué très longtemps au football, mais ce sont les trophées qui comptent. J’en ai douze : onze prix collectifs et un individuel, quand j’ai été élu meilleur jeune du championnat de Belgique."
Stoica est resté en contact avec plusieurs ex-Anderlechtois. "Récemment, j’ai vu Baseggio. Et Crasson est un bon ami. Je suis allé quelques fois en Thaïlande. Il a fait du bon boulot, là-bas. Le football était parfois meilleur que dans le championnat belge…"
"Je n'ai pas encore trouvé la bonne femme"
Stoica a toujours été très discret au sujet de sa vie privée. Mais même quand il était joueur, on ne l’a jamais vu en compagnie d’une copine. "Ce n’est pas un secret, je n’ai pas encore trouvé la bonne femme" , relate notre interlocuteur. "Et donc, je n’ai pas encore d’enfant. C’est vrai, je n’ai pas eu beaucoup de relations. La qualité est plus importante que la quantité (Rires). Toutefois, je ne désespère pas. Je suis patient…"